Les solutions des experts pour sauver l'euro
Quatre experts – Philippe Aghion, Mohamed el-Rian, Georges Hugeux et Benjamin Coriat -expliquent ce qui, selon eux, pourrait sauver l'euro.
Philippe Aghion, professeur d'économie à Harvard* : "Une remise à plat fiscale et budgétaire"
"Les pays de la zone euro doivent s’engager dans un triangle vertueux. Je crois, comme Mario Monti, qu’il faut réduire les déficits publics, investir dans la croissance et assurer la justice sociale. Pour cela, nous devons tailler dans nos dépenses et récupérer des recettes fiscales. En France, en rabotant les principales niches (niche Copé**, heures supplémentaires, DOM-TOM et restauration) on peut dégager 20 milliards d’euros. Nous devons aussi consentir un abandon partiel de notre souveraineté budgétaire en échange de la création d’eurobonds et d’un rôle accru pour la BCE." B.B.
* Et auteur, avec Alexandra Roulet, de Repenser l’État, Seuil, septembre 2011.
** Elle exonère d’impôt sur les plus-values les entreprises qui vendent leurs filiales.
Mohamed el-Rian, directeur général de Pimco : "Lancer un plan d'action global"
"La crise de la zone euro est telle qu’un plan d’action global s’impose. Il faut agir simultanément dans cinq directions. Il faut activer des programmes de réforme mieux ajustés dans les pays les plus endettés. Il faut mieux distinguer entre les États qui ont des problèmes de liquidité et ceux qui ont des problèmes de solvabilité. Il est urgent de parer à la fragilité croissante du secteur bancaire. Certaines banques sont sous-capitalisées, d’autres manquent d’actifs de qualité et certaines ont de plus en plus de mal à trouver des sources de financement. La BCE doit déclencher des coupe-feu plus puissants. Enfin, le socle institutionnel de la zone euro doit être renforcé entre les 17 États membres ou autour d’un cercle plus restreint de pays. Plus les décideurs européens tarderont à agir, plus les mesures à engager s’accroîtront." B.B.
Georges Hugeux, président de Galileo Global Advisors : "Installer l'accord du 27 octobre"
"Une décision a été prise le 27 octobre : le secteur privé a accepté de renoncer à 50% de son exposition à la dette grecque. Depuis, les négociations sont en cours… Arrêtons de faire des sommets et commençons par exécuter ce qui a été décidé. Les mécanismes de l’accord doivent être définis. Leur mise en place doit être la priorité. Il n’y a rien d’infaisable là-dedans. L’essentiel est d’avancer. Bien sûr, cela ne réglera pas tous les problèmes. Mais il faut casser cette spirale de la méfiance. Prendre ces mesures-là permettra de repartir dans une spirale vertueuse. Les choses peuvent changer. Si on atteint le point bas de la crise, les investisseurs vont recommencer à acheter." S.A.
Benjamin Coriat, coprésident des Economistes atterrés : "Faire racheter la dette par la BCE"
"On a construit l’euro autour d’une hypothèse : que les marchés seraient capables de discipliner les États. On leur a confié le monopole des achats de dettes souveraines. Et on a interdit à la Banque centrale européenne de le faire. Avec la crise de 2007- 2009, le robinet de la dette a coulé à flot (+ 25% en 2 ans dans la zone euro). Les marchés se sont mis à spéculer et à exiger des taux d’intérêt très élevés. Mais ils n’ont pas discipliné les dépenses des États. Cette idée ne marche pas. La BCE doit pouvoir racheter de la dette au même titre que les Banques centrales américaine ou japonaise. Cela va peut-être durer deux ou trois ans, le temps que l’on remette de l’ordre dans la maison Europe. Les Allemands y sont opposés. Il n’y a pourtant pas d’autres solutions pour écarter les pyromanes des dettes souveraines." S.A.
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