Ignacy Sachs, le père de l’écodéveloppement, est décédé le 2 août dernier. Eric Berr a souhaité lui rendre hommage.
Ignacy Sachs est un des grands témoins de notre temps, que ce soit par son parcours personnel hors du commun ou par sa carrière d’économiste, ou plutôt d’éco-socio-économiste comme il aimait à se définir[1]. Né dans une famille de banquiers juifs polonais en 1927, il est contraint d’émigrer en France, puis au Brésil en 1941, afin d’échapper à la barbarie nazie. Il revient dans sa Pologne natale – qui entame sa « déstalinisation » – en 1954, avant de séjourner en Inde – où il effectue son doctorat –, puis retourner en Pologne où il devient un proche collaborateur de Michal Kalecki au sein de l’école de planification et de statistiques de Varsovie[2]. Victime des purges antisémites du printemps 1968, il est à nouveau contraint à l’exil et s’installe finalement en France, à l’invitation de Fernand Braudel et de Claude Lévi-Strauss qui l’accueillent à l’école pratique des hautes études (EPHE) – qui deviendra par la suite l’école des hautes études en sciences sociales (EHESS). Son œuvre d’économiste se nourrit de ces multiples expériences et en fait l’un des meilleurs connaisseurs des économies du Tiers-monde. A ce titre, il nous invite, à travers une approche aussi originale que stimulante, à nous réapproprier, en abandonnant toute vision européocentrée, la question du développement.